Seul le prononcé fait foi. Monsieur le Président, Monsieur le Ministre Le Gouvernement a appelé de ses vœux une réforme du Code de l’entrée et du séjour des étrangers. Nous avons adopté ce projet de loi en première lecture au cours du mois de juillet. Il nous revient aujourd’hui d’une lecture au Sénat qui, en octobre dernier a permis l’adoption conforme de quatorze articles, la suppression de treize autres, et conduit l’introduction de dix-sept nouvelles dispositions. Ce faisant le Sénat en a modifié à la fois la substance et l’équilibre. Il convient de constater d’abord que les sénateurs ont apporté au texte des améliorations formelles ainsi que plusieurs avancées de fond dont la commission a souhaité qu’elles soient préservées, moyennant parfois quelques légères modifications. Telles sont les cas des dispositions relatives à l’information des étrangers assignés à résidence, de l’accès des associations en zones d’attente, ou encore de la répression à l’encontre de la fraude documentaire. Le renforcement des droits de la personne dans la procédure de communication trouve également son origine dans l’action du rapporteur de la commission des Lois du Sénat. Pour le reste, la commission des Lois de notre Assemblée a dans son ensemble rétabli le texte que nous avions adopté en juillet dernier. En premier lieu, votre commission a supprimé des dispositifs insérés par le Sénat que nous avions déjà rejeté en première lecture. Et que je vous inviterai du reste à rejeter à nouveau aujourd’hui, à l’occasion de l’examen des amendements. Il s’agit notamment de l’instauration de quotas en matière d’admission des ressortissants étrangers au séjour, de l’obligation pour les intéressés à faire la preuve de leur capacité d’intégration avant leur arrivée en France et du remplacement de l’aide médicale d’État par une aide médicale d’urgence. La Commission est revenue ensuite sur certaines mesures destinées à durcir les conditions d’entrée et de séjour de certains étrangers, et souvent de manière très excessive sans que d’ailleurs l’utilité de ces mesures ne soit démontrée. Ainsi la Commission a supprimé l’article qui portait à deux ans, au lieu de dix-huit mois actuellement, la durée de résidence minimale en France nécessaire pour un ressortissant étranger avant qu’il ne puisse déposer une demande de regroupement familial. A été également supprimée la disposition adoptée par le Sénat conditionnant la validité d’une attestation d’hébergement à son autorisation par le maire de la commune concernée. L’incrimination pénale créée par le Sénat à l’encontre des organismes qui ne défèrent pas aux demandes de communication de l’administration en matière de contrôle des demandes de titre de séjour a également été supprimée. De même pour la disposition prévoyant le dépôt d’une caution propre à éviter le placement en rétention administrative. Enfin, la commission des lois a rétabli des mesures que notre Assemblée avait adoptées en première lecture et qui ont été supprimées par nos collègues sénateurs. Ces derniers ont ainsi supprimé les délivrances de plein droit que nous avions initiées en première lecture. La commission des lois les a réintroduites. Il en va ainsi : · De la délivrance du visa de long séjour au conjoint de Français, · De celle de la carte de résident pour les parents d’un enfant français, les conjoints de Français et les personnes ayant été admises au titre du regroupement familial dès lors qu’elles en remplissent les conditions, · De l’autorisation provisoire de séjour aux parents d’enfants malades, · Du renouvellement de la carte de séjour temporaire aux étrangers victimes de violences conjugales, · Des détenteurs d’une carte de retraité pour l’obtention d’une carte de résident. Nous sommes également revenus sur des dispositions introduites par la deuxième chambre modifiant substantiellement l’esprit et les intentions du texte initial du Gouvernement. Nous avons ainsi réintroduit dans le projet de loi la notion d’absence d’accès effectif aux soins dans le pays d’origine pour la délivrance du titre de séjour étranger malade. De même la Commission a rétabli le régime de la carte de séjour pluriannuelle générale, tel qu’il était issu des travaux de l’Assemblée nationale, alors que le Sénat en avait réduit substantiellement la portée. Il s’agit là de la mesure la plus emblématique : la carte pluriannuelle, et sans doute la plus importante de ce projet de loi, permettant aux étrangers ayant vocation à rester sur le sol français pour une période plus ou moins longue. Vous l’avez rappelé Monsieur le Ministre, de se projeter sereinement dans l’avenir et dans une démarche d’intégration. En ce qui concerne les mesures préparant l’éloignement effectif de l’étranger faisant l’objet d’une Obligation de Quitter le Territoire Français, d’une OQTF, nous sommes là aussi revenus sur l’équilibre trouvé lors de la première lecture en rétablissant la priorisation de l’assignation à Résidence sur la Rétention administrative. La Commission a rétabli par ailleurs la disposition limitant la durée de la rétention ordonnée par l’autorité administrative à quarante-huit heures tout en confiant le contrôle de sa validité au juge des libertés et de la détention. Elle a fait de même pour le nouveau séquençage de la rétention administrative et l’encadrement de la rétention des personnes accompagnées de mineurs. Enfin la commission a étendu à l’ensemble des dispositifs d’assignation à résidence d’un étranger en instance d’éloignement, la possibilité de faire intervenir la force publique à fin d’escorte devant les autorités consulaires concernées. Enfin, nos collègues sénateurs, pour parapher l’esprit avec lequel ils ont abordé ce texte, lui ont accolé la dénomination de projet de loi portant diverses dispositions relatives à la maitrise de l’immigration. Nous avons donc rétabli son titre initial, moins réducteur. La France est un grand pays et elle est un pays d’immigration, finalement l’un ne va pas sans l’autre. Son histoire, son dynamisme, sa situation géographique, sa culture, ses valeurs participent de son attractivité. La présence d’étrangers sur notre territoire contribue tout autant à son ouverture au monde, à son rayonnement, à la diffusion et l’enseignement du français au delà de nos frontières, ainsi qu’au brassage culturel qui, de tout temps, nous a enrichit. L’entrée et le séjour des étrangers est un sujet complexe, trop souvent étrillé dans le but d’en tirer le profit politique maximal. Je le regrette. Nous devons sur ce sujet plus que tout autre, faire preuve de précision et de rigueur intellectuelle. Ne pas laisser penser par exemple que la France est totalement dépassée par l’entrée d’étrangers sur notre sol quand le nombre de nouveau titre de séjour stagne à 200 000 depuis des années. Ne pas laisser penser que nous pouvons empêcher l’entrée et le séjour d’étrangers dont la vocation est de vivre en France, et c’est heureux. Nous ne pouvons pas refuser aux français d’épouser des personnes étrangères, à des étrangers de donner naissance à des enfants français. Ne tombons donc pas dans la caricature préjudiciable à tous, ne tombons pas dans la méfiance vis à vis de toute entrée d’étranger dans notre pays et la défiance vis à vis des services de l’État dans leur application du droit. Ne tombons pas dans les arguties laissant penser que le respect des droits fondamentaux des étrangers constitue un renoncement à réguler les flux migratoires. Ce texte, Monsieur le Ministre est un beau texte. Dans un contexte où la France et l’Europe font face à des défis migratoires sans précédents, nous nous dotons avec ce Projet de Loi, quelques mois après l’adoption de la loi réformant l’asile, l’instrument efficace pour respecter les droits des étrangers et faire respecter le droit des étrangers. La France est une Nation ouverte qui doit accueillir avec bienveillance les étrangers qui ont vocation à vivre pour une période plus ou moins longue sur son sol. Cela n’est pas incompatible, bien au contraire avec le respect d’un État de droit qui entend faire respecter ses lois. Respect des Droits, respect de la Loi, sur ces deux points nécessaires à l’équilibre d’une bonne politique d’immigration, d’une politique durable, d’une politique solide, ce projet de loi remplit parfaitement son office. Je vous remercie.]]>