L’Assemblée examine actuellement en première lecture une proposition de loi initiée par des collègues sénatrices réformant le cadre de la protection de l’enfance. Le texte modifie certaines dispositions du Code civil et à la marge, du droit de l’adoption. A cette occasion, j’ai proposé de revoir la condition de mariage imposée aujourd’hui aux couples pour le recours à l’adoption. Ce débat est légitime. L’amendement que j’ai proposé a pour vocation d’étendre la possibilité d’adoption aux couples unis par un Pacs et aux concubins. Il sera déposé à l’occasion du débat public en séance. Les articles 343 et 346 du Code civil n’autorisent aujourd’hui l’adoption par un couple qu’à la condition d’être mariés, non séparés de corps, depuis plus de deux ans ou âgés tous les deux de plus de vingt huit ans. Ces dernières conditions sont bien évidemment conservées par la nouvelle rédaction de l’article 343 que je propose. L’objectif étant de lever l’obligation pour le couple d’entrer dans l’institution du mariage et non pas bien-sûr d’alléger le cadre de l’adoption qui suppose d’évaluer le projet parental et son aptitude à répondre aux besoins de l’enfant. Cette formalité matrimoniale était conforme aux modes de vie au moment de l’adoption de la loi de 1966, elle paraît aujourd’hui surannée. Hormis cette exception qu’il conviendrait de lever, l’établissement d’un lien de filiation n’est pas soumis à l’obligation du mariage, ni socialement, encore moins juridiquement. Pour preuve, 55% des enfants naissent aujourd’hui hors mariage, ils étaient 6% en 1966. Je veux rappeler par ailleurs qu’une personne seule a la possibilité d’adopter, même si elle se trouve en couple. La Cour de Cassation admet enfin depuis 2012 que l’adoption étrangère par deux personnes non mariées produit pleinement ses effets en France. Elle a indiqué à cette occasion que la condition du mariage pour l’adoption conjointe à des couples unis par le mariage « ne consacrait pas un principe essentiel reconnu par le droit français » (Cass 1ère Civ, 7 juin 2012). L’obligation du mariage est-elle en elle-même une garantie de stabilité de son cadre de vie pour un enfant qui a parfois derrière lui une histoire difficile ? Nous savons tous que la réponse est négative alors que près d’un mariage sur deux est dissous par le divorce. L’assurance pour l’enfant d’entrer dans une famille qui réponde à ses besoins et à son intérêt est très largement satisfaite par la procédure d’agrément et l’intervention in fine du jugement d’adoption. L’obtention de l’agrément est un préalable indispensable à la démarche d’adoption. Les couples qui s’y engagent doivent se soumettre à des investigations sociales et psychologiques longues et poussées en vue de l’obtention de cet agrément. Notre droit consacre depuis longtemps dans ses conséquences sur la filiation la neutralité des modes de conjugalités. Dès lors la production d’un acte de mariage pour l’adoption s’apparente aujourd’hui comme une obligation purement formelle qui ne doit plus exclure les couples ayant choisi de s’engager sans cette formalité.]]>