assemblée-defaut-imageDans l’arsenal du débat législatif, la Constitution de 1958 a donné au Gouvernement un outil dont il a usé 82 fois. 83 depuis aujourd’hui. Cet outil issu de l’alinéa 3 de l’article 49 permet de passer outre le vote de l’Assemblée Nationale. L’article 49 al 3 dispose : le Premier ministre peut, après délibération du Conseil des ministres, engager la responsabilité du Gouvernement devant l’Assemblée nationale sur le vote d’un projet de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale. Dans ce cas, ce projet est considéré comme adopté, sauf si une motion de censure, déposée dans les vingt-quatre heures qui suivent, est votée dans les conditions prévues à l’alinéa précédent. Le Premier ministre peut, en outre, recourir à cette procédure pour un autre projet ou une proposition de loi par session. Est-ce une procédure exceptionnelle ? Elle l’est devenue depuis la réforme constitutionnelle de 2008 qui limite le recours à l’article 49 al 3 à un texte par session, en plus du projet de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale. Auparavant, le Gouvernement n’était pas limité dans la fréquence, ni dans l’objet de son usage. Excepté les gouvernements Fillon, tous les Gouvernements ont eu recours à l’article 49 al 3. Entre mai 1988 et mai 1991, Michel Rocard l’a déclenché à 28 reprises. Plus récemment, Jean-Pierre Raffarin en a fait usage pour fermer le débat parlementaire relatif à la réforme des modes de scrutin régionaux et européens entravée par le dépôt de 13 000 amendements par la gauche et l’UDF. Dominique de Villepin a fait de même avec la Loi pour l’Égalité des chances qui instaurait le Contrat Première Embauche, ce qui ne l’a pas empêché de tomber sous la pression de la rue. Dans ces deux derniers exemples, en sus du vote, c’est le débat qui a été entravé. Concernant la Loi Macron, peut-on dire qu’il n’a pas eu de débat et qu’il n’y a pas de majorité ? Aux deux interrogations, je réponds par la négative. L’Assemblée Nationale a siégé trois semaines sur ce texte. La commission spéciale de 70 membres l’avait fait auparavant. Mille amendements environ ont été adoptés en commission et en séances. Chacun des 106 articles a été adopté formellement, chaque amendement défendu a fait l’objet d’un vote pour l’adopter ou le rejeter. Le Gouvernement est allé jusqu’au bout de la discussion, ne l’entravant à aucun moment. De nombreuses dispositions prévues par le Gouvernement ont été largement remaniées à la suite de ces discussions et de ces votes. L’article 49 al 3 a été déclenché juste avant le vote solennel de l’ensemble du texte. Mais la majorité des députés s’était déjà prononcée à des milliers de reprises, sur les amendements comme sur chacun des articles. Elle l’a fait en commission et l’a réitéré en séance. Il n’y a donc pas de « coup de force » comme l’analysent certains journalistes en quête de superlatifs. Le texte du projet de Loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques dit « Macron » visite de très nombreux dispositifs législatifs. Il encadre l’ouverture des commerces le dimanche, la privatisation de deux aéroports, de l’attribution du permis de conduire, le transport public par cars, les professions réglementées etc. Autant de sujets de mécontentements, autant de difficultés à réunir un consensus et une majorité absolue autour d’eux. Le Gouvernement a réuni une majorité de députés pour chacun des articles de ce texte et il l’a fait avec un souci de rassemblement et d’ouverture envers les propositions parlementaires. Cette majorité aurait sans doute été au rendez-vous dans l’hémicycle cet après-midi. Dans son intervention le Premier Ministre a déclaré ne vouloir prendre aucun risque. Il a eu raison. Gouverner n’est pas jouer.]]>

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